31 mars 2020
Alexandre Nanot

La dernière interview de Jean-Marc Thobois

Entretien réalisé le samedi 12 Octobre 2019 à Saint-Paul-Trois-Châteaux


1ʳᵉ Partie

Vous rappelez vous de votre premier contact avec la Bible ?

J-M Thobois : Dans mes souvenirs, cela remonte à mes 6 ans lorsque je fréquentais l’école du dimanche et c’est là que j’ai eu mon premier Nouveau Testament. Mais déjà chez mes parents, très jeunes, nous étions bercés dans cet environnement-là. Nous lisions la Bible en famille. Ma première bible m’a été offerte pour mes 8 ans et je me délectais à la lire, j’éprouvais un véritable plaisir.

J’ai pris très jeune cette discipline de lire la Bible tous les jours et je n’y ai jamais dérogé. J’ai enseigné mes enfants et mes petits-enfants dans cette voie.

Nous avons un devoir de transmission envers nos enfants et s’il y a bien une chose importante en ces temps, disons-le, d’apostasie, c’est de lire et de méditer la Bible. Car la Bible a cette puissance en elle-même qui, comme le dira Jésus, si elle tombe dans un bon terrain, produira un fruit extraordinaire.

Le point focal sur lequel Satan s’acharne est les hommes et l’une des priorités pour l’église devrait être, justement, de s’occuper de ses enfants, de ses jeunes.

Mais tout commence à la maison. Il ne faut pas s’attendre à ce que les moniteurs d’école du dimanche comblent nos démissions. Rien ne remplacera l’éducation d’un père et d’une mère. C’est cela que retiendra l’enfant, comme l’enseigne la Torah en Deut 6.7 : « tu les inculqueras à tes fils et tu en parleras quand tu seras dans ta maison, quand tu iras en voyage, quand tu te coucheras et quand tu te lèveras »  et si le peuple d’Israël a subsisté jusqu’à ce jour, c’est grâce à ce moyen-là.

Le drame de nombreux jeunes issus de couples chrétiens aujourd’hui, c’est qu’à la maison, il n’y a pratiquement plus aucune dimension spirituelle, ni éducation et transmission des valeurs de l’évangile. À l’époque de Jésus, on enseignait les enfants dès l’âge de 3 ans et on commençait par le livre du Lévitique, apprendre à connaître le pur de l’impur, ce qui est saint de ce qui est profane.

La démission des pères en ces temps est un véritable fléau et porte un coup à l’église. Le père a cette responsabilité de donner la vie certes, mais surtout de construire son fils et sa fille pour en faire des adultes responsables.

Quelle version utilisez-vous dans votre méditation personnelle ?

J-M Thobois : J’utilise une bible en hébreu pour l’Écriture et en grec pour la Nouvelle Alliance. Je la porte toujours avec moi.

Idéalement, quelqu’un qui veut méditer sérieusement la Parole devrait avoir recours aux langues originales, mais il est clair que ce n’est pas donné à tout le monde. Alors que faire ?

Le mieux est de pouvoir comparer plusieurs traductions et je dis de “bonnes traductions” car malheureusement certaines sont malhonnêtes et font entorse aux textes pour faire passer leur compréhension. Après, il est clair que toute traduction est influencée par sa propre théologie, sa sensibilité et sa compréhension du texte ; il est très difficile d’être neutre lorsque l’on traduit, mais c’est ce qui devrait animer le traducteur ou l’équipe de traduction. Comprenez bien, c’est toujours dangereux de construire ou d’étayer une doctrine sur une traduction. L’adage bien connu dit « traduire, c’est trahir » et pour une langue aussi riche de sens que l’hébreu, il y a une perte de sens obligatoire. Parfois, c’est là l’enjeu du traducteur, c’est l’obligation de faire des choix.

Un exemple : nous trouvons, en grec, l’expression : « baptizein en oudati ». Il y a deux manières de la comprendre, soit baptisé d’eau soit baptisé dans l’eau. Et juste à partir d’une préposition, le sens peut varier et dans ce cas précis, la théologie du traducteur va jouer. Selon les pédobaptistes, c’est-à-dire ceux qui baptisent les enfants, ceux-ci vont opter par baptiser d’eau, alors que les baptistes, ceux qui sont pour le baptême d’adultes et donc le baptême par immersion, vont traduire par baptiser dans l’eau.

Vous avez travaillé en partie sur la traduction dite “à la Colombe”. Procéderiez-vous, aujourd’hui, de la même manière que sur la méthode de traduction que vous aviez utilisé à l’époque ?

J-M Thobois : A l’époque, j’étais assez séduit par une méthode de traduction que l’on appelle l’équivalence dynamique et qui commençait à se répandre dont la bible Français courant et la Semeur ont fait usage. J’ai, pour la Colombe, relu le travail de base qu’avait fait l’équipe de traduction sur l’ensemble des 66 livres des Écritures.

Je me rappelle avoir travaillé, entre autres, sur un texte qui avait déjà été traduit par une équipe et qui avait essayé de faire une traduction la plus littérale possible.

C’est toujours le dilemme pour tous les traducteurs d’avoir une traduction qui colle au plus près de l’original et qui, de plus, est élégante pour le lecteur. Or, on ne peut pas avoir les deux. Si l’on penche vers une traduction plutôt littérale, on aura des lourdeurs, des expressions obscures.

A Nanot : On retrouve cette méthode de l’équivalence formelle qui consiste à traduire au plus proche des originaux dans la Pléiade ou chez Osty, et qui rendent le texte littéral. Je citerai deux exemples, l’un en Gen 27.33, l’original dit « qu’Isaac trembla d’un grand tremblement », ou bien dans le livre de l’Apocalypse 14.2 : le texte original traduit donne « comme des citharèdents qui citharisent sur leurs cithares ». Peu de bibles osent faire cette démarche mais c’est un choix du traducteur.

J-M Thobois : Pour le travail de la Colombe, j’étais accompagné du professeur Jules-Marcel Nicole de l’Institut biblique de Nogent, qui avait déjà fait ses preuves. Pour ma part, je n’étais alors qu’un jeune traducteur. Et quand ce cher professeur avait une idée en tête, on ne pouvait pas la lui enlever. Je dois dire que nous avons eu quelques débats assez épiques car lui tendait vers l’option littérale alors que moi, je tirais vers une traduction plus dynamique.

En 2012, on m’a demandé de travaillé sur une nouvelle traduction de la Bible. Par contre là, je suis allé dans ce sens. L’idée était de faire une traduction littérale, sans faire entorse au texte, sans le dénaturer.

La Colombe est une bonne traduction que je recommande. A l’époque, elle était assez populaire chez les évangéliques. Seulement voilà, au début des années 2000, pour la Société Biblique Française, la Colombe était une révision dépassée qui avait besoin d’être relookée. Le projet a abouti et la fameuse NBS est sortie. Mais les évangéliques ne s’y sont pas retrouvés. Ils ont fait pression chez la SBF pour que la Colombe soit de nouveau éditée. Depuis, on peut la retrouver sur le marché.

Pour en savoir plus sur la NBS et la Colombe, voir la fiche de la bible NBS.

Pour la SBF (Société Biblique Française), la Colombe était devenue trop littérale, alors qu’au début des années 2000, la tendance moderne était à l’équivalence dynamique. On veut faire parler Jésus, Ésaïe et les prophètes comme des hommes qui parleraient comme un français du XXIe siècle. En même temps, il y a un nivellement par le bas, c’est-à-dire que le texte doit être compréhensible par les gens les moins cultivés et pour ce faire, les traducteurs vont transformer toutes les expressions difficiles que l’on trouve dans la Bible, c’est-à-dire les hébraïsmes, les euphémismes, les mots techniques, etc, alors que l’on ne devrait pas. C’est comme dans n’importe quelle autre discipline. Si vous voulez vous initier à la pêche par exemple, vous devrez commencer par acquérir un vocabulaire, des expressions propres à cette activité comme « une mouche, un moulinet, comment faire un nœud universel, un nœud palomar, etc. » avant de vous exercer. Pourquoi la Bible serait-elle le seul livre où l’on ne devrait faire aucun effort ? Or, voyez-vous, nous sommes à l’âge du moindre effort.

Le danger est d’avoir aussi voulu changer des mots-clés du vocabulaire biblique comme le mot « repentance » qui dans la NBS devient « changer de vie ». La confusion est là : vous déménagez, vous changez de vie. Vous trouvez un nouveau travail donc vous changez de vie. Mais ce n’est pas ce que le mot « métanoïa » veut dire. Un autre exemple : le mot « ressusciter » est devenu « se réveiller ». Bref, c’est le gros défaut que je trouve aux traductions modernes.

A Nanot : De ce fait, ne coupe-t-on pas le texte de ses racines ?

J-M Thobois : C’est sûr, il y a une déjudaïsation et on arrive à des stades où c’est complètement aseptisé ou coupé du terreau de sa culture. Je prends des exemples. La Bible dit : « Il ouvrit la bouche et dit… ». Bon, il est bien évident que pour parler il faut ouvrir la bouche. « Il se leva et se rendit à …. » là encore, il faut bien se lever pour se rendre à tel endroit. La Bible parle ainsi, donc les traductions modernes, au lieu de dire « Il ouvrit la bouche et dit » vont simplement dire « il dit : » et au lieu de « il se leva et se rendit à … .» on le remplace par « il se rendit à … ». Ces exemples ne sont pas dramatiques, ils n’ont aucune incidence théologique. Mais n’est-ce pas plus utile pour le lecteur de savoir comment s’exprimait les gens de l’époque et ce faisant, cela nous introduit dans une autre culture, dans la culture de la Bible. Les bibles modernes déculturisent, c’est évident.

Vous avez fait vous-même une traduction de la Bible entre 2012 et 2018. Quelle méthode de traduction avez-vous utilisé et sur quels textes de base avez-vous travaillé ?

J-M Thobois : Je suis revenu à une traduction beaucoup plus littérale pour contrebalancer toutes ces traductions modernes qui utilisent l’équivalence dynamique. Pour faire court, l’idée de cette méthode est de ne plus traduire les mots, mais les idées. La Bible a, en bien des endroits, des passages obscurs et des textes où l’on s’arrache les cheveux. Et lorsque l’on compare plusieurs traductions, on peut voir que les autres n’ont pas plus compris que nous et c’est justement là, dans ces cas, que grande est la tentation d’interpréter.

Si l’on traduit littéralement, on pourrait penser que le lecteur ne va pas comprendre. Mais alors, mieux vaut-il laisser tel que le texte le dit ou bien prendre le risque d’emmener celui-ci sur une fausse piste.

A Nanot : On trouve un bel exemple dans Job 40 avec les deux bêtes à savoir Béhémoth et Léviathan, improprement traduits par hippopotame et crocodile. Certaines versions ont préféré garder les deux noms hébreux plutôt que de traduire par deux animaux connus dont il n’est nullement question dans le passage.

J-M Thobois : En effet, c’est là un exemple. Certains passages, quant à eux, sont très crus. Nous pouvons lire dans 1 Sam 25.22 : « Ainsi fera Elohîms aux ennemis de David et ainsi il ajoutera si je laisse, de tout ce qui est à lui, avant le matin, un pisseur contre un mur » ! C’est une manière de parler de tous les hommes mâles appartenant à Nabal. Une façon bien méprisante, j’en conviens.

Dans le livre de Daniel, nous trouvons « abomination de la désolation » qui en hébreu se dit  הַשִּׁקּוּץ מְשֹׁמֵם, qui se traduirait par la « crotte ou la merde qui rend déserte » aussi crue que lorsque nous l’employons en français.
Mais l’un des passages qui m’a donné et qui donne toujours du fil à retordre aux traducteurs, c’est le passage dans 1 Cor 7 au sujet des vierges qui se dit παρθένος. C’est un vrai casse-tête de traduire ce mot.

A Nanot : Au sujet du Nouveau Testament, quelle base avez-vous utilisée ? Celle du texte minoritaire et majoritaire ?

J-M Thobois : Cette traduction que j’ai entreprise depuis 2012 est entre les mains des éditions Esäie 55 dont le siège est près de Valence. La Trinitarian Bible Society est partisane des textes majoritaires et du « textus receptus ». Dans Marc 7, nous trouvons cette controverse entre Jésus et des pharisiens au sujet des aliments impurs. Certaines traductions utilisant le texte majoritaire ont cette incise au v.16 : « Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ». C’est très important ! Jésus utilise cette expression à la fin de ses paraboles.

A Nanot : Allons plus loin dans ce passage. Là où certaines bibles ont au v.19 : « ainsi il déclarait que tous les aliments sont purs », certains commentateurs en ont tiré la conclusion que Jésus abolissait la cacheroute, le respect de la nourriture cacher, et ce faisant, les juifs pouvaient manger de tout. Ce qui est faux. Jamais Jésus ne s’est affranchi de la cacheroute. De même, dans la vision de la nappe dont Pierre est l’objet, certains ont conclu que Pierre pouvait à présent manger du lard, du jambon et tout le cochon.

J-M Thobois : Oui, tout à fait. Cela est dû à la méconnaissance du judaïsme de l’époque de Jésus. Les chrétiens, aujourd’hui, ne savent pas faire la différence entre un aliment impur et un aliment cacher. Un animal impur, ça peut être un animal cacher mais qui a été mal cuit ou qui a été mal manipulé et de ce fait devient un animal impur, impropre à la consommation. On appelle cela taref. Ce que veut dire Jésus, c’est que ces règles sont venues après la révélation donnée au Sinaï et sont donc des prescriptions de la tradition des anciens. C’est contre cela que Jésus s’oppose. Donc, il déclarait pur tous les aliments, mais cela ne veut pas dire que Jésus s’autorisait à manger du porc, du lard et du cochon.

A Nanot : C’est certain et cela aurait été un scandale pour les juifs que de le voir manger de la viande non cacher. Un Juif, qui de plus, prétend être le messie et ne respecte pas la Torah de Moïse, comment aurait-il pu être crédible auprès de ses frères juifs ?

J-M Thobois : Et dans le passage de la nappe, Pierre lui-même donne l’explication de cette vision, et Il leur dit : « Vous savez qu’il est défendu à un Juif de se lier avec un étranger ou d’entrer chez lui ; mais Dieu m’a appris à ne regarder aucun homme comme souillé ou impur ».

 

2ᵉ Partie – Comprendre un verset

Comment comprendre ces versets et les traduire au plus juste ?

  1. Psaume 68.12
  2. Psaume 68.15
  3. Genèse 1.21
  4. Psaume 29.10
  5. Psaume 92.11
  6. Job 29.18
  7. Actes 8.37
  8. Romains 10.4
  9. Hébreux 7.18
  10. Psaume 120 – Shir Hamahalot

A Nanot : J’ai choisi une série de versets dont la traduction est souvent mal comprise ou problématique. Pour chaque série, j’ai choisi plusieurs traductions afin de les comparer. Encore un détail : pour chacun des versets, j’ai inséré le texte original hébreu ou grec.

Psaume 68.12

Le premier verset est tiré du Psaume 68.12. Commençons avec le verset dans l’original:

אֲדֹנָי יִתֶּן-אֹמֶר; הַמְבַשְּׂרוֹת, צָבָא רָב

BAYARD : Adonaï donne une parole une immense armée de porte-parole
PLÉIADE : Adonaï profère une parole il annonce la bonne nouvelle à la grande armée
MAREDSOUS : Le Seigneur parle : nombreuse est la foule des messagères de la bonne nouvelle
JAGER-1846 : Le Seigneur donnera la parole aux hérauts de sa gloire, afin qu’ils l’annoncent avec une grande force
LXX : Le Seigneur accordera le don de sa parole avec une grande puissance à ceux qui annonceront la bonne nouvelle
CRAMPON : Le Seigneur a fait entendre sa parole les femmes qui annoncent la victoire sont une troupe nombreuse
DARBY :  Le Seigneur donna la parole, grande fut la foule des femmes qui répandirent la bonne nouvelle
NBS : Le Seigneur donne une parole, et les femmes qui portent la bonne nouvelle sont une grande armée

A Nanot : Qui sont donc ces femmes qui annoncent une bonne nouvelle ?

J-M Thobois : Ici, il n’est pas question de femme, ni de la bonne nouvelle, c’est à dire de l’évangile, pour une raison simple, c’est que l’évangile n’existait pas à l’époque. Le contexte de ce Psaume est une réminiscence du don de la Torah sur le Sinaï. Nous trouvons dans le texte, et qui est repris dans la tradition juive, cette idée que Dieu a prononcé les 10 paroles, les 10 devarim à haute et intelligible voix de telle manière à ce que tout le peuple ait entendu la voix de Dieu. Mais le peuple effrayé dit à Moïse : « Parle-nous toi-même et nous écouterons ; mais que Dieu ne nous parle point, de peur que nous ne mourions. » Moïse sera seul à recueillir les paroles de Dieu et les transmettra au peuple. C’est en quelque sorte une restitution du ministère de prophète que de rapporter les paroles que Dieu dit.

Une deuxième idée est à relever : la Torah a été donnée dans le Sinaï, un endroit qui appartenait à aucun peuple en particulier mais à toutes les nations. Quand Dieu a prononcé ces paroles, elles ont été traduites dans 70 langues, de sorte qu’elles soient allées jusqu’aux extrémités de la terre, à toutes les nations.


Psaume 68.15

בְּפָרֵשׂ שַׁדַּי מְלָכִים בָּהּ – תַּשְׁלֵג בְּצַלְמוֹן

SACY : Pendant que le roi du ciel exerce son jugement sur les rois en faveur de notre terre, ses habitants deviendront blancs comme la neige du mont Selmon.
LXX : Tandis que le roi céleste dispersera les rois en sa terre, ils seront blancs comme la neige de Selmon.
TOB : Lorsqu’en ce lieu Shaddaï dispersa des rois, il neigeait sur le Mont-Sombre.
FC 1997 : Quand le Dieu très-grand dispersa les rois, la neige tombait sur le mont Tsalmon.
SYNODALE 8e : Quand le Tout-Puissant dispersa les rois, Il y eut sur le Tsalmon, comme des flocons de neige.

A Nanot : Comment comprendre ce verset ? En effet, l’un dit qu’il neigeait, l’autre que la terre devint blanche comme la neige ? Que dit littéralement ce verset ?

J-M Thobois : Là, il ne faut pas chercher midi à quatorze heure, l’hébreu est très clair : il neige sur le Tsalmon.

Genèse 1.21

וַיִּבְרָא אֱלֹהִים, אֶת-הַתַּנִּינִם הַגְּדֹלִים

CHOURAQUI : Elohîm crée les grands crocodiles
PLÉIADE :
Elohim créa donc les grands dragons
Jérusalem 1955 :
Dieu créa les grands serpents de mer
OLIVETAN :
Dieu, donc, créa les grandes baleines
SEMEUR :
Alors Dieu créa chaque espèce de grands animaux marins
JER 1973 :
Dieu créa les grands monstres marins
SYNODALE :
Et Dieu créa les énormes monstres marins
NEUCHÂTEL :
Et Dieu créa les grandes bêtes aquatiques
S.CAHEN :
Dieu créa les grands cétacés
Parole de Vie :
Dieu crée les grands animaux de la mer
Pierre de Beaumont :
Et selon leur espèce, il créa les grands monstres des mers

A Nanot : J’attire l’attention sur deux versions qui mentionnent “ selon leur espèce ”. Y a-t-il cette distinction dans l’hébreu ? Quelle est la traduction la plus cohérente ? Et qui sont ces « monstres » ?

J-M Thobois : « Taninim hagdolim », ce sont de grands reptiles. Ce serait les dinosaures. Du grec  δεινός / deinόs « terrible » et σαῦρος / saûros « lézard ». Ces dinosaures seraient vraisemblablement ces taninim hagdolim de ce verset et la suite du verset mentionne selon leur espèce.

Après traduire par baleines, crocodiles ou serpents, sûrement pas.

Psaume 29.10

יְהוָה, לַמַּבּוּל יָשָׁב;  וַיֵּשֶׁב יְהוָה, מֶלֶךְ לְעוֹלָם

FC : Le Seigneur siège au-dessus des eaux sans fin – Il sera toujours le roi
Jager 1846 : Le Seigneur répand un déluge sur la terre
BAYARD : Yhwh s’installe sur le déluge – Yhwh siège oh roi pour toujours
NBS : Le SEIGNEUR habite le déluge, le SEIGNEUR est assis en roi pour toujours
MARTIN : L’Éternel a présidé sur le déluge, l’Éternel présidera comme roi éternellement

A Nanot : Quelle traduction se rapproche la mieux de ce qu’il faut comprendre ?

J-M Thobois : En hébreu pas de temps, « Le Seigneur siégera pour l’éternité ». Le Seigneur siégeait lors du déluge, le Seigneur siégera roi pour l’éternité ou du monde.

Psaume 92.11

וַתָּרֶם כִּרְאֵים קַרְנִי;    בַּלֹּתִי, בְּשֶׁמֶן רַעֲנָן

MARTIN 1744 : Mais tu élèveras ma corne comme celle d’une licorne, et mon onction sera d’une huile toute fraîche.
NBS : Tu élèves ma corne comme celle de l’aurochs, je suis arrosé d’une huile fraîche.
FC 1997 : Tu m’as donné la force du buffle, tu as versé sur moi un peu d’huile fraîche.
Bible des peuples : Mais à moi tu me donnes l’assurance du buffle ; tu m’as fait le massage aux huiles de vigueur
CHOU : Tu exaltes ma corne comme celle des antilopes, je suis pétrie d’huile luxuriante.
Z.KAHN : tandis que tu grandis ma force comme celle du reêm, et que ma décrépitude reverdit au contact de l’huile.
TOB 1988 : Tu as relevé mon front comme la corne du buffle, et je baigne dans l’huile fraîche.

A Nanot : Au sujet de ce verset, deux remarques. La première concerne le mot « Reêm ». Sait-on exactement aujourd’hui de quel animal il s’agit ?

J-M Thobois : Le « Reêm » n’est certainement pas un buffle. La plupart des traducteurs ne connaissent que trop peu la faune et la flore du pays d’Israël et dans ce passage, sachez que l’animal en question existe toujours. Il s’agit de l’Oryx que l’on trouve encore dans le sud du Neguev. Dans ma traduction, j’avais mis le « Reêm » mais l’éditeur a voulu absolument mettre le buffle. Cette « Reêm » est de la famille des antilopes à deux grandes cornes, et si vous la voyez de profil, elle semble n’avoir qu’une corne. Ce qui a fait dire à certaines traductions des licornes. Donc traduire par buffle, ce n’est pas bon, et c’est le cas d’ailleurs pour les oiseaux, en particulier pour l’aigle et le vautour. Prenez Matt 24.28 : « En quelque lieu que soit le cadavre, là s’assembleront les aigles.» Et bien non, le nesher נָ֫שֶׁר est un vautour et il est nécrophage, donc se nourrit de cadavre, alors que l’aigle lui ne se nourrit pas de charognes, il n’est pas nécrophage. Donc, dans ce verset de Matthieu, il est bien question de vautours et non d’aigles.

Job 29.18

וָאֹמַר, עִם-קִנִּי אֶגְוָע;  וְכַחוֹל, אַרְבֶּה יָמִים

NEG : Alors je disais : Je mourrai dans mon nid, mes jours seront abondants comme le sable
OSTERVALD :
Et je disais : Je mourrai avec mon nid, et je multiplierai mes jours comme le phénix
Parole de Vie :
« Je me disais : “Je mourrai dans mon nid. Comme l’oiseau Phénix, je revivrai longtemps.
Sacy : Je disais : Je mourrai dans le petit nid que je me suis fait, et je multiplierai mes jours comme le palmier

A.KUEN : Je me disais alors : Je finirai mes jours au sein de ma famille, j’aurai des jours nombreux comme les grains de sable.
MARTIN :
C’est pourquoi je disais : Je mourrai dans mon lit, et je multiplierai mes jours comme les grains de sable.
JÉRUSALEM :
Et je disais : Je mourrai dans ma fierté, après des jours nombreux comme le phénix.

A Nanot : Entre le nid, la famille et la fierté, qu’est-ce qui convient le mieux ?
Pourquoi le sable, le phénix et le palmier ? Le mot hébreu semble ambigu ?

J-M Thobois : Littéralement, il est écrit : « J’ai dit : j’expirerai dans mon nid, comme le sable mes jours seront nombreux ou seront multipliés mes jours » – mais phénix, sûrement pas.

A Nanot : Phénix, c’est surprenant. Peut-être, est-ce dû à l’influence grecque de la LXX ? Et encore, si le livre de Job qui semble très ancien peut être contemporain d’Abraham, alors les Grecs et leurs influences n’existaient pas encore. Le phénix n’avait pas encore été inventé.

J-M Thobois : En tous cas, il n’est nullement question du phénix mais dans ce cas, la traduction la plus juste est celle de la NEG : « Alors je disais : Je mourrai dans mon nid, mes jours seront abondants comme le sable ».

Actes 8.37

NEG : Philippe dit : si tu crois de tout ton cœur, cela est possible.
L’eunuque répondit : Je crois que Jésus-Christ est le Fils de Dieu.

Codex de Bezea : Je crois que le Fils de Dieu c’est Jésus-Christ

A Nanot : Ce verset est quasiment absent des bibles catholiques et des bibles œcuméniques. Cependant, nous savons qu’il est présent dans le texte majoritaire et le textus receptus. Comment expliquez-vous cela ?

J-M Thobois : Les textes minoritaires sont principalement tous originaires d’Égypte et l’Égypte était, à cette époque-là, un recueil de toutes les hérésies possibles. Personnellement, je me demande si les textes minoritaires ne sont pas le fruit de ces groupes hérétiques qui ont trafiqué les textes pour les faire correspondre à leur théologie. On peut remarquer que beaucoup de ces textes, comme par hasard, touchent à la christologie.

Alexandre N : En effet, ce verset d’actes 8.37 qui est la déclaration de l’eunuque et qui consiste à confesser la divinité de Jésus-Christ comme Fils de Dieu et l’autre verset trinitaire par excellence du comma johannique que l’on trouve là encore que dans certaines bibles en 1 Jean 5.7b , tous deux touchent à la christologie.

J-M Thobois : On part de cette idée qui me semble contestable que les manuscrits minoritaires étant les plus anciens sont les plus fiables. L’ancienneté n’a rien à voir avec la légitimité du texte.

Romains 10.4

Τέλος γὰρ νόμου χριστὸς εἰς δικαιοσύνην παντὶ τῷ πιστεύοντι.

FC 1982 : Car le Christ a amené la loi de Moïse à sa fin,
pour que tous ceux qui croient soient rendus justes aux yeux de Dieu
SEMEUR : Car Christ a mis fin au régime de la loi
TOB : Car la fin de la loi, c’est Christ, pour que soit donnée la justice à tout homme qui croit.
CHOURAQUI : La finalité de la tora, c’est le messie
BIBLE JUIVE COMPL : Car le but que vise la Torah, c’est le Messie
PAROLE VIVANTE : La loi devait conduire vers celui qui en est l’accomplissement : le Messie

J-M Thobois : Telos, c’est le but, l’objectif. En ce qui concerne ce verset, il faut comprendre non pas que Christ a mis fin au régime de la loi, mais que la loi nous conduit vers Celui qui est le but, c’est-à-dire le Messie. Et là, en l’occurrence, Chouraqui a vu juste en traduisant : « La finalité de la Torah, c’est le messie ». Même la traduction de Stern dans sa bible juive complète a saisi le sens en rendant : « Car le but que vise la torah, c’est le Messie ».

Hébreux 7.18

Ἀθέτησις μὲν γὰρ γίνεται προαγούσης ἐντολῆς, διὰ τὸ αὐτῆς ἀσθενὲς καὶ ἀνωφελές:

BAYARD : D’une part, en raison de sa faiblesse et de son insuffisance, se trouve ainsi abrogée l’ordonnance antérieure
BIBLE DES PEUPLES : On remplace donc l’ancienne Loi parce qu’elle est devenue inefficace et inutile
TOB : De fait, on a là, d’une part, l’abrogation du précepte antérieur en raison de sa déficience et de son manque d’utilité
PAROLE DE VIE : L’ancienne règle était imparfaite et inutile, alors on l’a supprimée.
PAROLE VIVANTE : D’après cela, il est évident que l’ancienne législation se trouve désormais abrogée parce qu’elle était inefficace et n’aidait personne
BIBLE JUIVE COMPL: Ainsi, d’une part, la prescription antérieure est écartée à cause de sa faiblesse et de son inefficacité

J-M Thobois : Parole de Vie et Parole Vivante y vont fort. Si je prends le grec… « proagousen », c’est l’idée d’un prolongement, pro c’est aller au-delà, et l’autre mot est… cause de « astenes » – ce mot grec peut vouloir dire la faiblesse, la première Torah n’avait pas la force d’amener les choses à la perfection. Ce n’est pas qu’elle était inutile, mais elle était faible. Pour le coup, la BIBLE JUIVE COMPLÈTE a très bien traduit, en rendant par : « la prescription antérieure est écartée à cause de sa faiblesse et de son inefficacité. »

Psaume 120

Shir Hamahalot   שִׁ֥יר הַֽמַּעֲל֗וֹת לְדָ֫וִ֥ד

BAN : Cantique pour les pèlerinages
SEM : Cantique pour la route vers la demeure de l’Éternel
FC 2019 : Chant pour ceux qui montent à Jérusalem
S21 : Chant des montées
BAYARD : Chant par degrés
MARTIN : Cantique de Mahaloth

A Nanot : Comment comprendre ce mot הַֽמַּעֲל֗וֹת et à quoi ces Psaumes font-ils référence ?

J-M Thobois : Hamahaloth se traduit généralement par les montées, mais c’est aussi le mot qui est employé pour pèlerinage à pied ou monter à pied. En hébreu, une montée se dit « alyah bereguel » mais là, nous avons « alyah lereguel » qui se dirait plutôt montée “vers” le pied.

Une récente découverte archéologique qui s’est effectuée entre le Jourdain et le sommet de la montagne a mis à jour cinq sanctuaires israélites en forme de pied et qui touche à une idéologie que fouler au pied un endroit, c’est en prendre possession, comme Josué à qui il sera dit : « Tout lieu que foulera la plante de tes pieds, je te le donnerai. » On retrouve également cette idée dans le Psaume 110 où il est dit : « Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je mette sous tes pieds tous tes ennemis. » Les premiers sanctuaires israélites avaient donc la forme d’un pied, c’est-à-dire le processus de conquête, et on avançait en marquant les victoires par des sanctuaires qui marquaient les étapes. La « alyah lereguel » était donc une montée vers le pied et on a constaté que la Jérusalem de l’époque qui est devenue le centre unique du pèlerinage avait, elle aussi, la forme d’un pied.

À noter que ces cantiques sont au nombre de quinze et qu’ils étaient des chants que l’on entonnait quand les pèlerins arrivaient dans le temple. À l’époque du deuxième temple, il y avait un escalier monumental qui séparait la cour des femmes de la cour d’Israël, et sur ces marches se tenait le chœur des lévites et à chacune des quinze marches, on chantait l’un de ces psaumes. On montait par des degrés, par des marches.

A Nanot : Et quand ces Psaumes auraient-ils été composés ?

J-M Thobois : À l’époque du premier temple. En fait, le recueil des Psaumes était un recueil de prières ou de cantiques chantés qui faisait partie de la liturgie du temple.

3ᵉ Partie – Les occurences

Est-ce bon de traduire systématiquement le même mot à chaque occurrence, comme l’a fait Darby ou Osty ?

Koilas κοιλία (23 occurrences dans le NT)

Matthieu 12.40 – DARBY
Car, comme Jonas fut dans le ventre du cétacé trois jours et trois nuits

Luc 1.15 – DARBY
car il sera grand devant le Seigneur, et il ne boira ni vin ni cervoise ; et il sera rempli de l’Esprit Saint déjà dès le ventre de sa mère (LS dit Sein)

Jean 7.38 – DARBY
Celui qui croit en moi, selon ce qu’a dit l’écriture, des fleuves d’eau vive couleront de son ventre.

Apocalypse 10.10 – DARBY
Et je pris le petit livre de la main de l’ange, et je le dévorai ; et il fut dans ma bouche doux comme du miel ; et quand je l’eus dévoré, mon ventre fut rempli d’amertume. (LS mes entrailles)

J-M Thobois : Il n’est pas question d’un cétacé chez Jonas, encore moins d’une baleine, mais d’un grand poisson. C’est une méthode de traduction que de traduire systématiquement chaque mot grec par son équivalent en français.

On a deux mots en grec pour parler de repentance, à savoir métanöia et espitrophéïn. Métanöia, c’est avoir un esprit nouveau alors qu’espitrophéïn c’est se retourner.

Shalom par exemple ne pourrait pas être toujours traduit par paix. Parfois, il faut le traduire par bonheur. Mais là encore, ce sont toutes des subtilités de la traduction.

Alexandre N : Je vous propose un deuxième exemple. Serviteur ou esclave – δοῦλος

On retrouve ce mot 125 fois dans le NT.

LS traduit tantôt et majoritairement par « serviteur », et parfois selon le contexte par « esclave ».

Chez Darby, on trouve systématiquement le mot « esclave ». Philip 1.1 : Paul et Timothée, esclaves de Jésus-Christ, à tous les saints dans le Christ Jésus… Là où LS traduit par serviteurs:

  • Jacques, esclave de Dieu
  • Jude, esclave de Jésus-Christ et frère de Jacques
  • Siméon Pierre, esclave et apôtre de Jésus-Christ
  • Révélation de Jésus-Christ, que Dieu lui a donnée pour montrer à ses esclaves les choses qui doivent arriver bientôt ; et il l’a signifiée, en l’envoyant par son ange, à son esclave Jean.

J-M Thobois : En hébreu, on a le mot « eved Adonaï » : le serviteur de l’Éternel. Là aussi, c’est un choix du traducteur.

4ᵉ Partie – Questions Diverses

On constate ces derniers temps un retour en force des Unitariens et des anti-trinitaires qui font du tort à l’église. Bien que ce mot ne soit pas dans la Bible, la doctrine est bien présente. Pourquoi ce retour à ces vieilles hérésies et comment les combattre ?

J-M Thobois : Pour la simple raison, et que l’on retrouve principalement dans les églises évangéliques, que les chrétiens ont une vision de l’église complétement déformée. En effet, on considère, à tort, que l’église a cessé d’exister quand elle a viré dans les hérésies vers 325 avec Constantin et qu’elle est réapparue, pour certains, avec le mouvement des évangéliques dans le XVIIIe siècle et pour d’autres, comme les pentecôtistes, en 1901 avec la redécouverte de la glossolalie et le Pr Charles Parham. Et même cette page de l’histoire est très méconnue des pentecôtistes. Il y a donc, pour la majorité, une méconnaissance totale de l’histoire de l’église.

A Nanot : Je ne vous le fais pas dire, une méconnaissance et un désintérêt. On pourrait interroger certains chrétiens évangéliques et leur demander qui sont Calvin, Luther, Tertullien ou Wesley. Pour certains, ils n’en ont jamais entendu parler. Une collègue de travail me racontait qu’un jour, à l’occasion des 500 ans de la naissance de Jean Calvin, une personne a téléphoné et souhaitait le mail de Jean Calvin afin de lui écrire. Ma collègue a vraiment cru à un canular, mais insistant sur sa demande, il a fallu annoncer la réalité à cette brave personne que Mr Calvin était malheureusement mort depuis 445 ans ! Ça fait sourire quand on le raconte, mais c’est plutôt triste. C’est vous-même qui, un jour, lors d’une tournée vers Bordeaux sur le thème de la Réforme, avait annoncé que vous enseignerez sur Luther et à la fin de la réunion, un chrétien est venu vous demander où était la ville de Luther afin d’entendre l’enseignement. Bon là encore, on s’en amuse mais cela montre bien la méconnaissance de l’histoire de l’Église. L’autre chose, c’est que l’on n’enseigne pas ces choses dans les milieux évangéliques.

J-M Thobois : Le Baal Chem tov, un sage d’Israël, disait que « celui qui ignore son passé est condamné à le revivre ». Dans les cinq premiers siècles de l’église, il y a eu maintes controverses sur la question de la christologie, à savoir : Qui est Jésus ? Et là, sont apparues, dans le domaine de la christologie, toutes les hérésies possibles et inimaginables. En passant par le modalisme, l’arianisme et j’en passe. Et finalement, après des discussions souvent très orageuses, l’église dans son ensemble, c’est-à-dire toutes les églises d’alors, sont arrivées à un consensus et c’est au Concile de Nicée en 325 que la première pierre sera posée en réaction à l’arianisme et se poursuivra jusqu’au Concile de Tolède en 589 sur la question du Filioque. Mais là n’est pas la question. Les églises évangéliques ont nié ces grandes pages de l’histoire et elles le font encore au siècle présent. On constate, presque à chaque génération, que ces erreurs qui étaient combattues dans les quatre premiers siècles de l’église, le sont encore aujourd’hui.

L’autre point est l’apparition des églises dites messianiques qui veulent partager l’évangile avec les juifs. Et c’est légitime. Mais sachant que les juifs rejettent l’idée d’un messie divin, ils s’imaginent qu’en supprimant la notion de trinité et en faisant de Jésus un simple être humain, alors il sera plus facile aux juifs d’adopter l’évangile. En supprimant le dogme de la trinité, on fait de Jésus un simple être humain, alors il devient plus facile d’adopter un autre évangile. Pour eux, Jésus est un saint homme, mais pas le Fils de Dieu. On en vient aux vieilles hérésies parce qu’on ne veut pas tenir compte de ceux qui ont été avant nous -des hommes qui avaient une culture, tel qu’Athanase, d’une connaissance extrêmement profonde.

Dernièrement, il y a un homme qui, soi-disant, découvre subitement que Jésus n’est pas le Fils de Dieu. Il envoie ses prétendues révélations à tout le monde, semant la confusion au milieu du peuple de Dieu et ébranlant les plus faibles. Mais qui est-il pour oser faire cela ?

A Nanot : Ces personnes sont orgueilleuses. Elles ont la prétention de vouloir refaire le monde. Mais une part incombe aux responsables d’églises qui devraient régulièrement enseigner le peuple dont ils ont la charge sur les croyances fondamentales telles que le credo des Apôtres et la confession de foi de Nicée-Constantinople. L’église devrait avoir, entre autres, le souci de transmettre la foi aux plus jeunes, aux nouveaux convertis et de poser la question : En quoi croyez-vous ? Et c’est à ce moment-là que le Credo des Apôtres ou le Symbole de Nicée-Constantinople sert de base. Je crois en Dieu, qui est Dieu ? Qu’est-ce que la Bible nous dit sur Dieu ? Je crois en la résurrection d’entre les morts, quelle est notre espérance après la mort ? Et à la trinité, comment essayez de la comprendre et de réfuter les hérésies. Mais pas sûr que beaucoup de chrétiens sauraient définir ces dogmes. Faute de connaissance, les hérésies s’installent et trop peu sauraient les démasquer et défendre la saine doctrine. C’était l’un des soucis majeurs de l’apôtre Paul. Préserver la saine doctrine.

J-M Thobois : Et pour moi, comme vous l’avez mentionné, le symbole de Nicée-Constantinople, c’est après le Nouveau Testament, un texte de base, parce que chaque mot a été pesé, ciselé comme un joyau, et là, c’est vraiment le condensé, la substantifique moelle de la christologie. Nous pourrions nous arrêter rien que sur le mot « homoioussos » qui signifie que Jésus est de la même essence que le Père. Quand j’étais pasteur à l’époque, nous lisions le credo tous les dimanches.

A Nanot : Amillénarisme et Théologie de la substitution vont-ils de pair ?

J-M Thobois : Absolument. L’amillénarisme conduit inévitablement à voir, en Israël et le peuple juif, une réalité qui est dépassée. Elle céderait ainsi la place à l’église dans le moteur du plan de Dieu. Il y a différentes formes. Il y a ce qu’on appelle la théologie de l’accomplissement, c’est-à-dire que toutes les promesses sont accomplies en Jésus. Donc c’est aussi déclarer qu’Israël est caduque, que toutes les promesses faites à Israël sont caduques et, par conséquent, qui la remplace ? C’est l’église.

On adopte aujourd’hui dans la plupart des instituts bibliques l’enseignement de l’amillénarisme et on revient inévitablement à la théologie de la substitution.

Autres remarques

A Nanot : Je partage une autre réflexion sur deux traductions qui peuvent être tendancieuses

Car il y en a trois qui rendent un témoignage avec sublimité,
le Père, la Parole, et la Sainte Présence, et ces trois sont indivisibles en Jésus.

SACY Car il y en a trois qui rendent témoignage dans le ciel,
le Père, et la Parole, à savoir la Sainte Présence de Christ, et ces trois-là sont indivisibles en Jésus.

J-M Thobois : Il y a manifestement entorse au texte. À partir du moment où l’on fait une traduction comme celle-ci, on ouvre la porte à toutes sortes d’interprétations. Ce sont des textes trop fondamentaux pour se permettre de les traficoter.+

A Nanot : L’autre exemple est celui-ci

Jean 10.30 est souvent un verset argumenté pour contrer la trinité.
Toutes les traductions quasiment disent : Moi et le Père, nous sommes un.

Néanmoins, la Vulgate-Abbé Glaire le rend ainsi : Moi et mon Père nous sommes une seule chose

et Sacy 1991 : Mon Père et moi nous sommes une même chose.

J-M Thobois : Je regarde dans mon Nouveau Testament grec, édition critique… le grec dit bien, nous sommes en un et pour le comma, il y a en trois qui rendent témoignage dans le ciel, le Père, la Parole et l’Esprit.

En son temps, vous posiez la question suivante à Jacques Ellul : Quel sera le plus grand danger de l’église ? Je vous la pose à mon tour, car vous avez, en tant que ministère itinérant, un regard sur l’ensemble de l’Église évangélique française, toutes dénominations confondues. Quel serait, en 2019, le bilan de santé ? Quel est le danger qui la guette et quel serait le remède ?

J-M Thobois : Le bilan de santé de l’église n’est pas brillant… L’église est malade, très malade et cela ne va pas en s’améliorant. À mon sens, les deux grands dangers sont la montée de l’Islam et l’influence des écrans qui sont de véritables pièges terribles. Ils sont en train de déshumaniser tous les êtres humains. C’est la pire chose à mon sens.

Les chrétiens qui deviennent accros aux médias, c’est la pire chose qui menace l’église moderne.

Le remède, c’est d’utiliser cela à bon escient, ne pas être esclave et les utiliser au minimum. Il y a aussi un esprit de séduction qui touche toute l’humanité : la recherche du bien-être. Égoïsme, matérialisme, société de consommation, qui détruisent la vie spirituelle.

A Nanot : Et le conseil ?

J-M Thobois : Revenir à la bible ! Oui, revenir à la Bible et à l’Évangile. Pas d’autre solution. Et l’un des drames de l’église, c’est qu’il faut, comme disait un pasteur pentecôtiste, la dépoussiérer, la mettre au goût du jour. Certaines églises vont même jusqu’à mettre la Bible de côté et prétendent que Dieu va donner de nouvelles révélations. Quand on en est là, on a déjà franchi des limites.

Au vu des événements politiques, économiques, spirituels, comment entrevoyez-vous les mois, j’ose dire même les années à venir, en ce qui concerne l’Église d’une part et le peuple juif ?

J-M Thobois :  C’est très difficile à dire. Il ne faut pas s’attendre à un grand réveil mondial mais à l’apostasie. Cependant, il y aura un reste comme le dit l’Écriture.

L’existence d’Israël sera contestée. Mais nous sommes dans un processus de rédemption qui, comme le dit le psalmiste, ne pourra pas être arrêté. Les choses tendent à leur fin.

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Jean-Marc Thobois, ami d’Israël et enseignant de la Bible, est mort dans la nuit du 13 au 14 mars 2020 emporté par le coronavirus COVID-19 à l’âge de 75 ans. C’est sa fille qui l’a découvert le 14 au matin, à son domicile d’Arradon dans le Morbihan. Contrairement à son épouse, dont les jours ne sont plus en danger, il n’avait pas été hospitalisé.

La mémoire du juste dure toujours. Ps 112.6

6 Commentaires

  1. JEAN-IGOR WOLGA

    Stupéfiant d’érudition et de connaissances bibliques !
    Du Jean-Marc Thobois pur jus !
    De quand date cette interview ?
    Merci de l’avoir mise en ligne.

  2. MIREILLE EMAIN

    Que de trésors dans ces quelques lignes !
    J’espère qu’un éditeur se chargera de les publier pour que beaucoup de chrétiens entendent ces vérités.
    La transmission des sages , car Jean-Marc en était un, doit continuer !
    A diffuser sans modération !
    Merci Alexandre pour ce précieux entretien et merci à la famille de Jean-Marc qui transmette son oeuvre si importante pour l ‘Eglise en ce temps cahotique !

    • Moutou Edmee

      Je souhaite que cet interwieux soit editer afin de renforcer la foi de ceux qui s appretent a rentrer au repos et pour aider la jeune generation a persever Merci beaucoup

  3. Traversaz Yves

    Bonsoir. Que dire d’un tel homme de Dieu. En recherchant Dieu,moi même,j’en suis venu à l’Hebreu,et c’est comme cela que j’ai découvert JM Thobois. Dieu,la littéralement investit dans son combat. Être dans la voie du Maître. En écrivant ces quelques mots j’en ai les larmes,et je remercie Dieu de pouvoir encore écouter JM Thobois sur les réseaux sociaux. Oh Dieu bénit sa famille.

  4. Jérémie

    Merci de nous tenir informé de la publication de la bible traduite par monsieur Thobois.

    Soyez bénis

  5. Samuel

    J’espère la publication de cette traduction par J-Marc Thobois et l’attends avec impatience. Une date de sortie est-elle envisagée?

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