1 mars 2023
Alexandre Nanot

La sexualité selon la pensée Divine

Pour introduire notre propos, nous dirons que la sexualité s’inscrit dans le cadre d’un engagement mutuel, d’une alliance d’amour entre un homme et une femme, et qu’elle est indéniablement souhaitée de Dieu car il en est l’auteur suprême, le concepteur. Dans la Parole de Dieu, celle-ci n’apparaît jamais comme quelque chose de mauvais en elle-même, du moins, lorsque les préceptes et principes divins en sont respectés. Aussi, la mépriser, la considérer honteuse ou taboue serait faire injure au créateur, nous devons donc la penser, l’appréhender, la recevoir tel un don de Dieu, telle une composante fondamentale de notre humanité.

Afin de tenter de cerner au mieux ce que représente la sexualité dans la pensée et le plan de Dieu, et quels en sont les buts principaux, nous prendrons appui sur quelques versets bibliques et citations d’Éliane Amado Lévy-Valensi (E.A.L.V.), (1919 – 2006), philosophe, psychanalyste, exégète, figure majeure de l’École de pensée juive de Paris.

Nous lisons dans Béréchit, le premier livre de la Genèse :

« Dieu créa l’Homme à son image ; masculin et féminin, Il les créa. »
                                                                                          Genèse 1.27

L’unité plurielle, à l’image de Dieu

Ainsi, nous pouvons voir qu’au commencement Elohim créa l’adam, le premier être humain qui était « masculin et féminin ». Celui-ci portait un nom double, masculin et féminin : ISCH/A.

Et « Dieu vit tout ce qu’il avait fait et voici, cela était très bon. »
                                                                                  Genèse 1.31

« Le Couple est donc à l’image du Tout-Puissant. L’union de l’homme et de la femme incarne l’unité suprême retrouvée, à l’image de l’Unité qui est en Dieu. » E.A.L.V.

En effet, dans la Bible, Dieu se présente lui-même comme étant « UN ». Nous lisons en Deutéronome 6.4 : « Shemaʿ Yisrā’ēl YHWH elohāynuu YHWH eḥāḏ » (« Écoute Israël, l’Éternel [est] notre Dieu, l’Éternel [est] un »). L’adjectif hébreu employé ici est ehad : il s’agit d’une unité plurielle, impliquant une unité formée de différentes parties. Cela est très clairement exprimé dans ce verset : « C’est à cause de cela que l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme ; ils sont deux en une seule chair. » Genèse 2.24 (Trad Pirot/Clamer).

Ainsi, l’unité n’est pas l’uniformité mais la diversité réconciliée. « Le masculin et le féminin qui se réuniront annoncent la promesse des origines : celle de la RE-création au sein du couple de l’étincelle divine à l’image de laquelle ils ont été créés. » E.A.L.V.

De fait, nous dirions que le but ultime de la sexualité selon le plan Divin serait prioritairement, celui de recréer, de reconstituer dans le couple, cette unité sacrée à l’image du Tout-Puissant.

Une rencontre intime

« Un peu de la puissance de Dieu est passée en l’homme dans la mesure où il peut s’unir à la femme et dans la mesure où, l’un par l’autre, ils peuvent créer. »  E.A.L.V.

En hébreux biblique, le verbe exprimant l’union, au sens de relation sexuelle, se dit yada‘ identique au verbe « connaître » : « Et l’homme ayant connu Ève sa femme, elle conçut et enfanta Caïn. » Genèse 4.1.

La sexualité permet donc de rencontrer intimement son vis-à-vis, l’une des perspectives de cette union étant celle de la reproduction ordonnée par Dieu lui-même, et ce afin de perpétuer l’espèce : « Et vous, soyez féconds et multipliez, répandez-vous sur la terre et multipliez sur elle. » Genèse 9.7.

« Il y a donc dans l’union de l’homme et de la femme, du principe mâle et du principe femelle, fidélité aux normes de la création. » E.A.L.V.

Ainsi, à l’image de Dieu le créateur, non seulement l’homme et la femme, au travers de la sexualité, sont UN mais l’un et l’autre sont aussi appelés à devenir eux-mêmes participants et impliqués dans le processus de procréation. Il est d’ailleurs ici intéressant de souligner qu’avant la cinquième semaine de gestation, lors du développement fœtal, il n’y a aucune différenciation sexuelle. Puis, celle-ci s’opérant, elle vient révéler l’identité sexuelle propre à chacun. Ce processus n’est donc pas sans rappeler le schéma de la création originelle. 

Toutefois, si le désir et l’instinct qui poussent à s’unir physiquement, a, entre autres, comme visée le fait de se reproduire, d’engendrer, précisons que ce n’est cependant pas un objectif obligatoire de la vie conjugale, la sexualité ne se limitant pas qu’à cela comme nous allons le voir.

Le joyau même du mariage

Éliane Amado Lévy-Valensi précise aussi cette maxime de rabbi Abba mentionnée dans le Zohar : « Le mâle seul ne mérite même pas le nom d’Homme tant qu’il n’est pas uni à la femelle. »

« C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair. » Genèse 2.24

Dans cette union, chacun y apporte l’essence même de ce qui le constitue, en vue de ne faire plus qu’ UN, corps, âme et esprit devant le créateur. Tout en se définissant comme étant communion intime à l’autre, la sexualité est ainsi le joyau par excellence de la relation. Puisqu’elle constitue le cœur même de l’unité véritable qu’un homme et une femme puissent connaître, en cela, elle contribue fortement à renforcer leur attachement, à exprimer leur amour, leur tendresse, leur affection réciproque sans réserve, et ce, de la façon la plus intense qui soit. Cela a pour conséquence de réaligner, stabiliser et consolider le couple, au sein des vicissitudes, des peines mais aussi des joies de la vie de tous les jours.

N’oublions pas de préciser que si la sexualité nourrit l’amour, l’amour, lui, gouverne la sexualité, car sans amour, la jouissance sexuelle ne se réduirait qu’à un instinct purement animal et égoïste. Mais l’amour, lui, demeure au-delà du désir et du plaisir.

Une protection contre la tentation

« Vous pouvez, certes, en plein accord l’un avec l’autre, renoncer pour un temps à vos relations conjugales afin de vous consacrer davantage à la prière, mais après cela, reprenez vos rapports comme auparavant. Il ne faut pas donner à Satan l’occasion de vous tenter par votre incapacité à dominer vos instincts. » 1 Corinthiens 7.5.

Ici, nous comprenons clairement qu’un des autres buts de la sexualité, et non des moindres, est bien d’éviter au couple de tomber en tentation. Chacun, dans la réciprocité, devrait pouvoir venir répondre au besoin naturel, biologique et fondamental de l’autre.

En ce sens, la sexualité ne devrait donc pas être négligée et bien se situer au centre des préoccupations communes du couple, et ce, toujours sous couvert de l’amour, de la compréhension, du respect et du don réciproque. Notons que « en plein accord l’un avec l’autre » induit inévitablement le fait de devoir entrer en communication et de demeurer dans le dialogue avec son vis-à-vis.

Ce passage biblique spécifie bien que ces « relations conjugales », au sens de rapports sexuels, devraient pouvoir venir s’équilibrer et s’harmoniser avec la dimension de la communion spirituelle du couple, tel le mouvement d’un balancier. Nous constatons donc, que dans le plan de Dieu, la sexualité protège et sauvegarde la relation, le mariage : elle a vocation d’apporter au couple un équilibre essentiel, tant sur le plan physique, émotionnel, psychologique, que spirituel.

Une célébration intense de l’amour conjugal

Nous ne pouvions bien évidemment pas aborder le thème de la sexualité sans citer le Cantique des Cantiques (littéralement « le plus beau Chant » en hébreu ). Écrit entre le ᴠɪɪᵉ et le ᴠɪɪɪᵉ siècle avant Jésus-Christ, il fut intégré au canon biblique dans les premiers siècles de notre ère ; il étonne et émerveille à la fois.

Si les rabbins y voient, de façon allégorique, la relation entre le Dieu d’Israël, Yavhé et le peuple élu, il n’en demeure pas moins en réalité que les huit chapitres se révèlent être un véritable hymne à l’amour et à l’érotisme, nous décrivant de façon poétique, au travers de symboles et métaphores, une vision presque idéale de la sexualité. 

Pour exemple citons le verset 2 du chapitre 1 : « Qu’il me baise des baisers de sa bouche ! Car tes baisers sont meilleurs que le vin ».  Le terme traduit par « baisers » (en hébreu, דּוֹדֶיךָ, dodeikha) signifie amour (entre les sexes) et insinue des actes d’amours (baisers, caresses). Cette composante érotique disséminée dans la totalité du texte biblique, ainsi que la passion, la sensualité, la mise en exergue des cinq sens et le désir physique qui s’en dégagent, invitent le couple (le bien-aimé et la bien-aimée) à célébrer l’amour dans sa forme la plus intense qui soit et ce bien indépendamment de la question de la reproduction.

Nous pourrions aussi citer ce verset, tiré de la traduction Chouraqui, dont l’interprétation, nous en conviendrons, est pour le moins, des plus évocatrices : « Mon bien-aimé a retiré sa main du trou ; et mes boyaux se bouleversent pour lui » Cant 5.4.

Ici, il s’agit bien de vivre l’amour et la sexualité pour ce qu’ils sont en tant que tels. La sexualité y apparaît belle et bonne, tel un don de Dieu produisant de l’amour, de l’harmonie et de l’épanouissement. On est loin de l’image d’un christianisme castrateur et culpabilisant, voire moralisatrice des Pères de l’Église.

De même, mentionnons Proverbes 5.18-19 : « Que ta source soit bénie, et fais ta joie de la femme de ta jeunesse, biche des amours, gazelle pleine de grâce : sois en tout temps enivré de ses charmes, sans cesse épris de son amour. ». Ou bien encore Ecclésiaste 9.9 : « Jouis de la vie avec la femme que tu aimes, pendant tous les jours de ta vie de vanité. »

Un don de Dieu, néanmoins perverti

Ainsi, la sexualité, le plaisir sexuel, et la jouissance que l’on peut éprouver, ne relèvent pas du domaine du péché lorsque cela est vécu sainement dans le cadre institué par Dieu. Il faut donc se réjouir d’être des êtres sexués et prendre plaisir à la sexualité au lieu de la condamner. La sexualité, le sacré, le spirituel ne sont pas antinomiques bien au contraire.

Cependant, « Dans l’unité première, l’homme et la femme n’étaient qu’un tout. Le péché les a séparés et leur vocation est alors de retrouver l’unité première. »  E.A.L.V. « L’homme et sa femme étaient tous deux nus, et ils n’en avaient point honte. » Genèse 2.25.

Cette sexualité selon Dieu, n’a en son origine, intrinsèquement rien de malsain, cependant celle-ci s’est trouvée pervertie du fait de l’entrée du péché dans le cœur de l’Homme.

« Or, La femme vit que l’arbre était bon à manger et agréable à la vue, et qu’il était précieux pour ouvrir l’intelligence ; elle prit de son fruit, et en mangea ; elle en donna aussi à son mari, qui était auprès d’elle, et il en mangea. Les yeux de l’un et de l’autre s’ouvrirent, ils connurent qu’ils étaient nus. » Genèse 3.6-7

« Tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi. » Genèse 3.16. Dans le texte Hébreux, ce mot désir est le même que celui utilisé dans Genèse 4.7 dans ce contexte il signifie « désir pressant de contrôler », il s’agit donc d’une domination malsaine.

Tout cela n’est que la conséquence due à la désobéissance, car le péché étant entré dans le monde a corrompu notre humanité. L’homme et la femme prirent soudainement conscience, connaissance du bien et du mal. Leur sexualité qui jusqu’ici était vécue, considérée de façon naïve et innocente, a commencé à se déformer, à se pervertir, et à devenir impure en prenant une tout autre dimension et signification dans leur esprit. Ceci relevant du fait de la rébellion et de l’orgueil inhérents au péché, c’est là que les problèmes ont sérieusement commencé et perdurent encore aujourd’hui.

La sexualité a toute son importance mais aussi toute sa complexité. En effet, si elle porte en son sein les pulsions de vie qui nous régissent en tant qu’être humain, elle n’en demeure pas moins le lieu névralgique où se déposent et se condensent bon nombre de nos dysfonctionnements et désordres intérieurs refoulés.

« Soyez sobres, veillez. Votre adversaire, le diable, rôde comme un lion rugissant, cherchant qui il dévorera. » 1 Pierre 5.8

De fait, l’adversaire de nos âmes, par le biais de notre chair, de nos mauvais désirs, penchants, et perversions intérieures de toute sorte, s’applique à vouloir faire de la sexualité une abomination en la détournant de son but premier, à savoir : « l’union de l’homme et de la femme incarne l’unité suprême retrouvée, à l’image de l’Unité qui est en Dieu. » E.A.L.V.

Son intention étant depuis toujours, de vouloir détruire l’œuvre parfaite du Créateur. A ce titre nous constatons donc en ce monde, une sexualité de plus en plus dépravée, distordue, pervertie et avilie, et ce, à un degré inimaginable. Nous devons en être parfaitement conscients et nous en protéger, en nous conformant à la Parole de Dieu dans nos vies sans aucun compromis.

Un essentiel du plan divin

Ainsi, nous l’aurons donc vu, la sexualité est originellement pure, saine et même sainte, elle relève de l’œuvre créatrice et parfaite de Dieu. Elle unit deux créatures sexuellement différentes mais parfaitement complémentaires. Cette union possède une dimension à la fois hautement spirituelle, car comme le dit Jésus : « Ils ne sont plus deux ; ils font un » Matthieu 19.5-6 et à la fois charnelle, physique car c’est le moment où le couple devient « une seule chair ».
Les deux dimensions se mêlant ainsi l’une à l’autre harmonieusement. « L’un face à l’autre, l’un pour l’autre, dans un amour où le charnel est spirituel, où le spirituel est charnel ». P. Grelot, Le couple humain dans l’Écriture, Foi Vivante 118 (Paris, Cerf  1969).

Elle est indéniablement un don divin par excellence, ses fonctions peuvent être diverses mais elle s’inscrit surtout dans un processus d’équilibre et d’harmonie, essentiel à la vie du couple. Pour autant, précisons que le couple pour pouvoir exister, tenir et se réaliser ne peut faire l’impasse de s’articuler, se structurer et de demeurer autour de quatre composantes majeures, à savoir :
– la communion spirituelle conjointe
– la communication (verbale et non verbale
– l’amour inconditionnel envers l’Autre (présuppose l’acceptation de l’Autre dans sa différence car l’Autre n’est pas Moi)
– le don de soi (dans l’acceptation et le respect de soi-même)

Le tout devant être axé, ancré sur le socle fondateur de la Parole de Dieu. C’est ce qui va donner au couple sa consistance, sa force, et le maintenir équilibré, un peu à l’image de la structure d’une maison.

C’est bien dans ce contexte-là, et seulement là, que la sexualité peut alors venir s’inscrire, se vivre et s’exprimer dans sa dimension la plus complète et la plus originelle qui soit. Elle va ainsi contribuer à parfaire et couronner le couple, elle va pouvoir le contenir, le protéger, tel le toit sur la maison. Précisons, que tous les éléments de la maison sont importants et interdépendants, cependant, il y a un ordre des choses à respecter, car quoi qu’on en dise, on ne construit certainement pas celle-ci en commençant par le toit, ni même par un des murs aussi importants soient-ils … ceci reste à méditer.

Si cette façon de vivre la sexualité peut paraître un idéal lointain à atteindre, dû au péché qui sévit dans nos vies, contribuant à en déformer la véritable signification, précisons néanmoins que cela reste du champ du possible. La condition sine qua non n’est autre qu’il nous faut impérativement venir nous recentrer sur la pensée Divine.

Pour ce faire, nous ne pouvons faire l’économie, d’une part, de nous écarter radicalement du péché, en nous débarrassant des œuvres mauvaises de la chair, en nous repentant et en nous appuyant sur l’œuvre de Christ à la Croix et sur ses promesses, et d’autre part, de nous efforcer de traiter sérieusement nos désordres intérieurs issus du péché originel. Désordres auxquels nous devons faire continuellement face et qui sont de véritables obstacles interférentiels à notre progression, maturité et entendement spirituels. Ceci relève donc en grande partie de notre responsabilité personnelle. 

En d’autres termes, nous pourrions terminer en disant que ce dont nous aurions besoin, serait d’un grand « Reset » spirituel. Aussi, en ce sens, cherchons à ce que notre intelligence puisse continuellement être renouvelée : « Soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence » Romains 12.2 de manière à venir rétablir dans nos vies le sens et les valeurs véritables de la sexualité telle que conçue dans la pensée divine.  Puisque le bonheur, l’épanouissement, la solidité et la pérennité du couple en dépendent, il serait dommageable que celui-ci passe toute son existence à côté de la bénédiction, sans jamais pouvoir l’intégrer. De fait, il est bien dans son intérêt de venir se reconnecter sur cet  “essenCiel” et merveilleux plan Divin, s’il souhaite être au bénéfice de ces perspectives relationnelles heureuses et harmonieuses.

Anonyme

Sur le même thème, veuillez voir l’article Exode 25.18 – Les deux chérubins ou la sainteté de l’union conjugale.

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